ootd

esprit libre et vagabond, il divague d’une pièce à l’autre sans réel objectif. c’est son temps de pause entre le travail et les études. sa dernière année, il veut pas la rater. dix ans qu’il sue devant des centaines de livres à relire et relire jusqu’à ce que ça rentre. ce n’est que récemment, pour la première fois, qu’il a décidé d’engager une prostituée pour se changer les idées. mais avant cela... même maintenant, l’homme occupe son temps libre à retrouver une once d’émotions. il s’en souvient la première fois – l’alcool, la tête qui tourne, un minimum d’adrénaline dans son sang qu’il voulait à tout prix ressentir à nouveau. ça, c’était la première année. la seconde, ils ont disparu d’un seul coup. le pauvre n’a même pas été ébranlé ; il se trouvait là devant la tombe, sans rien dire. des chuchotements indiscrets pour critiquer son manque de pitié, des rumeurs lancées évidemment. mais jiyu ça ne l’atteint pas. tant qu’il a son travail (son unique raison de vivre, son automatisme) il poursuit sans s’occuper des autres.
une bouteille de soju prune – parfum favori – à la main, un joint dans l’autre, il n’y a pas meilleure pause selon lui. la tête qui tourne, bien des gens auraient refusé un tel mélange à cause de la nausée qui s’en suivrait. mais pas jiyu. le médecin est prêt à faire des sacrifices pour retrouver un minimum d’intérêt à la vie (instinct de survie).

alors qu’il s’écroule dans un fauteuil, la tête en arrière, l’homme entend des pas. dieu, il ne sait même pas où il est, ni quelle heure il est. la faute au travail ça, qui fait perdre la notion du temps et des priorités. les parents sont là, derrière, ils doivent être fiers non ? c’est obligé. ils ont forcément vu l’absence de tristesse sur son visage cette fois-là, alors pour éviter de ressentir cette boule de nervosité dans l’estomac, il se perd dans les études. comme papa et maman l’ont toujours souhaité. à l’hôpital, on le reconnait : très bel homme, plus proche d’un idol que d’un docteur, et pourtant il excelle dans son domaine – à part le tact évidemment. son job, c’est de prescrire et d’opérer. c’est pratique de ne pas être ému quand un patient décède, pensent-ils.

tu veux quoi ? sa voix est grave, hostile, jiyu se redresse pour faire face à l’inconnu aux pas silencieux. oh, mais c’est pas n’importe qui en fait : shen. le petit shen, c’était son nom avant l’accident. maintenant, c’est juste un gamin lambda qui veut faire la même chose que lui. ah, n’importe quoi les jeunes de nos jours. mépris dans son regard, le brun se redresse avec difficulté. j’suis en pause là, je fais des consultations qu’à l’hôpital. une taffe de prise et il le zieute de haut en bas. sauf si t’es venu pour aut’ chose ? fais-vite. parce qu’il a pas son temps, pas la patience de lui accorder un peu d’affection.

dieu qu’il a changé, le jiyu.

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Une matinée chargée, entre les cours de biologie et d’anatomie : Shen ne savait pas où se donner la tête. C’était tous les jours comme ça, d’ailleurs. Jamais de repos, seules les romances avec les livres étaient possibles en médecine. Il était passionné par ce qu’il étudiait, il n’était certes qu’en première année mais ce début de semestre s’annonçait florissant. Il espérait sincèrement être major de sa promo. Avec tout le travail qu’il faisait, il méritait bien ce titre. Il espérait briller comme Jiyu sunbaenim, qui avait presque terminé son cursus. Il était un homme respectable selon Shen, il l’admirait pour son travail acharné et le pensait très cultivé. Il avait tout pour plaire, il était un véritable fan de lui. Ça pourrait limite faire peur. Il était toujours prêt à l’aider, et d’autant plus après l’accident. Il avait certes ses responsabilités en tant qu’étudiant, mais il était aussi un hoobae exemplaire qui était prêt à déplacer des montagnes pour cet homme. Il parlait souvent de lui à ses parents, et eux espéraient que Shen devienne comme lui. Un cercle vicieux. S’ils savaient ce que ce Jiyu était devenu. Même le petit Shen l’ignorait malgré les rumeurs qui tournaient autour de lui, tant qu’il n’avait pas eu affaire à cette façade, il fermait les yeux. Bien trop peur que ce soit la vérité.

Souvent, pendant son temps libre, il le cherchait. Toujours inquiet de son état, même s’il était certain qu’il n’avait pas besoin de lui, Shen voulait être là pour lui montrer qu’il pouvait compter sur lui. Cette pause était donc consacrée à sa recherche, se rappelant aussitôt qu’il avait tendance à en profiter dans le parc. Il avait fait un détour pour récupérer des petits présents, histoire de ne pas venir les mains vides. Un café glacé pour le monsieur, des gimbap pour remplir son estomac. Des pas silencieux, il ne voulait pas le gêner. Il le voyait au loin, Shen souriait grandement. Il avait hâte de lui parler, tel le véritable fan qu’il pouvait être. Il ne voulait pas vraiment le déranger mais son cœur lui disait de s’approcher, en toute bienveillance. Shen ne voulait pas lui faire du mal, jamais en tout cas. Alors, il arrivait très vite à sa hauteur en tendant de ses mains le café glacé et les gimbap.

Tu veux quoi ? Hostile, froid. Il avait été accueilli d’une façon étrange, il ne comprenait pas vraiment pourquoi il était ainsi. Il se pinçait les lèvres avant de bafouiller, intimidé. J-je voulais pas vraiment vous déranger sunbaenim... Presque en train de chialer, le môme. Il était décontenancé, surtout quand son regard se posait sur sa bouteille de soju. Il l’aidait à se redresser. Il se demandait bien pourquoi il buvait seul, dans ce parc. N’ayant toujours pas remarqué le joint. J’suis en pause là, je fais des consultations qu’à l’hôpital. Il se pinçait la lèvre, après l’avoir remarqué. Il ne disait rien, mais il était surpris. Ce n’était pas son genre, du moins c’est ce qu’il pensait… Après l’avoir un peu trop idéalisé, les paillettes en pleine figure. Sauf si t’es venu pour aut’ chose ? Fais-vite. Il bafouillait encore, ce changement de comportement… Il était sans mots. Déçu ? Non, il ne l’était pas vraiment. Il avait clairement besoin d’aide Jiyu, et l’inquiétude de Shen ne faisait que d’augmenter en le voyant ainsi. J’ai juste profité de ma pause pour vous offrir cette nourriture, ce n’est pas avec du soju que vous allez avoir des forces… Il l’avait toujours vouvoyé, peut-être qu’il ne devrait pas ? Il avait trop de respect pour Jiyu. Cette nouvelle rencontre lui avait littéralement retourné l'estomac. Un être humain pouvait autant changer ? Shen était si naïf...

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Déjà exaspéré alors qu’il ne s’est rien passé, Jiyu soupire. Pourquoi est-ce que pendant sa pause, on le sollicite à chaque fois. Combien de fois a-t-il pu rentrer chez lui et dormir directement sans être interrompu, ou bien juste profiter de sa pause sans qu’on vienne le bousculer ou lui proposer, ici, de la nourriture. Connaissance ou pas connaissance, le brun s’est habitué à une solitude forcée – la société n’a pas l’air d’accepter quelqu’un de mentalement handicapé, surtout quand le handicap en question empêche toute émotion ou appel à l’aide.

De la bouffe ? Il en rirait presque. Tu me prends pour un dieu avec ton offrande ? Ou tu cherches à me flatter ? Il prend des mains du plus jeune la barquette avant de la poser sur le côté vide du banc. C’est vrai qu’un des effets secondaires de cette drogue, c’est l’irrésistible envie de manger après consommation. Bien au contraire, le soju me permet de tenir plus que le café ou le thé. Pas de remerciement, ça lui prendrait trop d’énergie. Tout ce qu’il fait c’est un signe de la tête avant de reprendre une taffe puis de la souffler au visage du gosse – c’est involontaire en soi, l’homme ne se rend pas compte que souffler de la fumée à la gueule des gens c’est impoli. Petit silence qui s’installe entre les deux, le plus âgé zieute encore une fois de haut en bas ce garçon habillé comme un collégien, le sourcil arqué. Pourquoi t’es là même ? J’donne pas de cours, et je suis occupé. Même la bouffe quoi, je sais me faire à manger. Jiyu a une impression de déjà-vu en disant ça, c’est exactement la même situation que lorsque sa cousine était venue lui apporter un panier-repas fait par sa tante. Dieu sait toutes les réprimandes qu’il s’était pris après avoir râlé. Est-ce qu’il éprouve des remords ? Pas vraiment. Est-ce qu’il le referait ? Pas vraiment non plus, ça l’énerve quand on l’engueule. Alors il fait un tout petit effort le médecin, juste pour éviter d’avoir un gamin à consoler et de se faire taper sur les doigts par des étudiants se prenant pour la justice sociale. T’as mangé ? M’apporte pas ça si toi-même tu te nourris pas. Il ne sait pas, ou bien il a oublié Jiyu, que Shen a un rapport particulier avec la nourriture. Il continue sur la même voie cependant. Prends un morceau et peut-être que j’mangerai aussi.

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Surpris par ce qu’il était devenu. Il était sur le cul, il se demandait si c’était sa vraie nature mais la naïveté lui disait qu’il s’agit simplement de son état d’ébriété qui le rendait ainsi. Il se sentait véritablement mal, prêt à se chier dessus limite. Ses souvenirs de lui étaient plus beaux, et le voir ainsi l’alarmait à un point. Il avait peur que quelque chose lui arrive. Après tout, il s’agissait de son sunbaenim et même si ça pouvait paraître déluré… Il l’admirait énormément. Pour sa force, son intelligence et sa beauté également. Il l’avait brusqué.

Un rire qui le tendait, il ne savait pas quoi faire. Il se sentait piqué, bête. Son hostilité gratuite lui faisait monter les larmes aux yeux, mais il se contenait. Ses yeux brillaient. Perturbé par sa froideur, il bafouillait. Il le prenait pour un Dieu, c’est vrai mais en vu de sa méchanceté presque gratuite, il préférait mentir. Mais pas du tout ! Ça va pas la tête ! Petite moue, il se sentait de trop. Les lèvres pincées. Il avait tellement changé, méconnaissable. C’est l’alcool qui le rendait ainsi, c’est ce qu’il se disait. Il n’attendait rien en retour, tant qu’il prenait son présent c’était l’essentiel. Un sourire, certes presque inexistant, s'étirait sur son visage drôlement éteint depuis qu’il a ouvert sa bouche. Le nuage toxique à son visage, il arquait son sourcil avant de la chasser en lui hurlant dessus, peu crédible mais il était irascible en ce qui concerne la clope. Yah, faites attention ! Il toussotait, ne supportant pas l’odeur de la cigarette. Je suis venu prendre de vos nouvelles mais visiblement ça n’a pas l’air d’aller..Puis au lieu de râler, contentez vous d’accepter la “bouffe” que je vous donne. Bouffe mis entre guillemets à l’aide de ses mains, il le gonflait. Il ne s’énervait que très peu mais sa façon de lui parler le dérangeait un peu trop. Ce n’est pas parce-que vous êtes soûl, que vous devez être impoli.  Après ses mots, le médecin avait l’air d’avoir compris qu’il allait trop loin, toujours dans la naïveté Shen… Il se détendait un peu mais mine de rien, ses insecurités revenaient au galop. J’ai déjà mangé. La nourriture et lui, une haine incontestable. Il lui avait tout bonnement menti, il n’avait rien mangé et rien que l’odeur de la nourriture lui donnait envie de vomir. disait-il, en tentant de se sauver du mieux qu’il pouvait. Tout ça est pour vous, faites vous plaisir.